C'est de nouveau un bon flic, une bonne bouille de travolta qui comme un vieux bordeaux se bonifie avec l'âge, et un méchant, regard bleu glace, deux pistolets dorés plaqués dans le dos (ça c'est nouveau), des ricanements de hyène, donc, un bon et un méchant, disais-je qui s'affrontent.
Chacun a son aréopage, qui de sous-flics, collaborateurs et trices, qui de malfrats, chauffeurs, gardes du corps.
Côté vie privée, le flic a une épouse de flic, résignée, même pas jolie, et une fille ado, tendance techno-punk. Le courant passe mal.
Le méchant a un frère, introverti, timide, cerveau des opérations de terrorisme, mais pas débrouille pour une peanut.
A la 7ème bagarre le mauvais est considéré comme mort , le flic récompensé, et on pourrait s'arrêter là.
Mais c'est mal connaître John Woo, le réalisateur né à Hongkong, qui nous a concocté une suite délirante, tournée avec de grands moyens (jusqu'à 15 caméras qui filment en choeur... et on choisi la meilleures prise!). Ca aussi, c'est nouveau.
Ce que ne dit pas La critique, c'est qu'on renoue ici avec le fameux mythe de Frankenstein, façon médecine actuelle: la greffe d'un visage ou d'autres parties, sur un corps étranger. Pour coincer le frère du méchant, le flic prend donc le visage du malfrat, supposèment mort. Et l'autre, qui était moins mort qu'on croyait, se fait poser la bonne tronche du flic. Et la greffe prend, c'est à dire, que le spectateur entre dans le jeu. Scotché au fond de son fauteuil il est vraiment spectateur impuissant, car comme dans les films du gros Alfred Hitchcock, il sait "qui est qui" mais ne sait pas encore "comment".
Si en théorie on peut changer de visage et de corps, on ne change pas ses tics et ses habitudes, Frankenstein, tout monstre qu'il était, offrait des fleurs à une petite fille au bord du lac. Ce qui, dans le présent film, donne des scènes cocasses: le non-fumeur toraille à tort et à travers, le prude fonctionnaire met la main aux fesses de ses fliquettes, fredonne du rap avec "sa" fille qui ne reconnaît plus son père, c'est le cas de dire. Et le flic avec sa tronche de gangster a beaucoup de peine dans une partouze cocaïne, alcool et jolies filles.
Dans le rôle du flic et gangster un John Travolta tout en nuances et dans le rôle du gangster et flic, un Nicolas Cage, odieux à souhait.
Une mise en scène efficace, un montage réglé à la Kalachnikoff, l'ensemble ne vous laisse pas reprendre votre souffle. Heureusement qu'il y a l'entre-acte, car le film dure plus de 2 heures, que vous ne voyez, d'ailleurs pas passer.
Xavier Koeb